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25 janv. 2011

Procès : imprécisions, omissions et incohérences favorables à Bissonnet

COUR D'ASSISES DE L'HERAULT, MARDI 25 JANVIER 2011, DOUZIEME AUDIENCE DU PROCES DES TROIS ACCUSES DE L'ASSASSINAT DE BERNADETTE BISSONNET, LE 11 MARS 2008 A CASTELNAU-LE-LEZ.

Il est une évidence depuis le début du procès : les trois accusés et des témoins ont menti et mentent peut-être encore ! L'audience de ce mardi en fut une magistrale illustration, dès le matin, avec la venue à la barre d'Yvon S., 72 ans, un retraité qui vit désormais près de Sommières, dans le Gard et qui à l'époque des faits résidait à Saint-Clément-de-Rivière. C'est lui qui hébergeait le vicomte Amaury d'Harcourt, lorsqu'il s'est levé de table le 11 mars 2008, alors qu'avec une invitée, ils n'avaient pas mangé le dessert : "C'était vers 20h45 je pense, Amaury qui avait amené une pizza s'est brusquement levé en nous disant qu'il avait oublié une veste polaire achetée l'après-midi chez les Bissonnet, à Castelnau et qu'il fallait qu'il la récupère. Je lui ai dit que c'était bien tard et qu'il n'avait qu'à aller la chercher plutôt le lendemain matin. Il est parti la chercher et il est revenu une heure plus tard, sans la veste". Yvon S. n'avait pas parlé de la présence d'une invitée à ce dîner lors de ses premières auditions par les gendarmes. "Vous avez menti, monsieur" lui fait remarquer Me Henri Leclerc, l'un des défenseurs du mari. "Non, maître, je voulais protéger cette femme qui n'avait rien à voir avec tout ça" répond-t-il. "Et aujourd'hui, vous mentez ou vous dites la vérité, car vous rapportez des choses qui sont en contradiction avec vos déclarations lors de l'enquête" insiste Me Leclerc. Le témoin est irrité : "Dites, c'est quoi ces insinuations, vous n'allez pas quand même m'accuser d'avoir été le complice de M.d'Harcourt quand même" ! Le président intervient pour calmer le jeu : "Vous n'allez pas traiter de menteurs les témoins quand ils ne se souviennent plus de ce qu'ils ont dit, ça remonte à presque trois ans. Disons que ce sont des omissions plutôt". Mais, le bâtonnier Frédéric Vérine (un des avocats de Jean-Michel Bissonnet) et Raphaëlle Chalié ("partie civile" pour ses deux fils et pour le père de Bernadette) ne ménagent pas Yvon S. qui laisse exploser sa colère : "Je vous interdit de me juger".
Trahison
S'ensuit une vive passe d'armes entre le bâtonnier Vérine, peu inspiré et Jean-Robert Phung, un des avocats du frère de la victime. Me Phung reproche à son confrère de tronquer la lecture des procès-verbaux du témoin. Yvon S. assure "s'être senti trahit quand Amaury d'Harcourt a été arrêté et qu'il a avoué avoir jeté l'arme du crime dans le Lez. J'ai été stupéfait, c'était quelque chose d'épouvantable. Je suis anéanti depuis. Pour moi, Mr d'Harcourt a été manipulé, il est impensable qu'il ait pu monter ce scénario sanglant, il en est incapable, il a été manoeuvré par M.Bissonnet, il s'est laissé entraîner au nom de l'amitié, il est comme ça le vicomte". Jacques C., 69 ans, un banquier à la retraite qui chassait dans la propriété du vicomte dans l'Yonne lui succède à la barre et rejoint le témoignage d'Yvon S. sur "la gentillesse, la simplicité du vicomte qui savait recevoir". Il se souvient avoir chassé deux ou trois fois avec Jean-Michel Bissonnet. Et il se rappelle qu'un an avant l'assassinat de sa femme, Amaury d'Harcourt lui avait déclaré, alors qu'ils étaient dans la cuisine du château de Saint-Eusoge que "Bissonnet voulait tuer sa femme. Je lui ai demandé si c'était une plaisanterie, il m'a dit, non, non, il veut s'en débarrasser parce qu'elle refuse de divorcer, ça m'ennuie cette histoire. Je ne l'ai pas cru, ça me paraissait tellement surréaliste".
"Alors, il l'a fait"
Un avocat du mari intervient : "Vous nous dites que M.D'Harcourt vous a fait cette confidence dans sa cuisine, alors que lors de votre audition par les gendarmes, vous avez déclaré que c'était l'ex-femme du vicomte qui vous l'avait rapporté ? Vous mentez ?". Jacques C. ne se laisse pas faire : "Aujourd'hui, je dis que c'était dans la cuisine, c'était dans la cuisine". L'épouse de Jacques C. vient dire le contraire : "Non, mon mari l'a appris non pas par M.d'Harcourt, mais par son ex-femme". Me Henri Leclerc : "Donc, votre mari a menti tout à l'heure". L'épouse de Jacques C. maintient que "le plus important, c'est que nous sommes plusieurs à avoir entendu dire que M.Bissonnet voulait faire tuer sa femme. Moi, je n'y croyais pas non plus, jusqu'au jour où on m'a téléphoné pour me dire, tu sais Bernadette Bissonnet a été assassinée, je me suis dit, alors, il l'a fait". Henri Leclerc : "Vous n'avez jamais entendu M.Bissonnet vous dire ça, c'est M.D'Harcourt qui vous a dit qu'il voulait faire tuer sa femme". Oui, affirment les témoinsLe président, Joël Mocaer veut en avoir le coeur net sur ces contradictions : "Est-ce que vous ne venez pas au secours de votre ami Amaury d'Harcourt ?". Non, répondent-ils.
"Le gant s'est déchiré"
Ces imprécisions et ces omissions sont du pain béni pour les trois avocats de Jean-Michel Bissonnet, qui vont s'engouffrer dans les incohérences du vicomte, invité par le président à confirmer certaines déclarations faites en garde à vue, puis durant l'instruction. Visiblement usé, Amaury d'Harcourt hésite dans ses réponses et multiplie les incohérences. "Il ressort des écoutes téléphoniques qu'à votre fille et à vos amis qui s'inquiètent de votre sort, vous racontez que Mme Bissonnet a été tuée lors d'un cambriolage qui a mal tourné, parce qu'elle s'est défendue en faisant une prise de judo à l'agresseur. Vous répétez que Jean-Michel est étranger à ce meurtre. Puis, dès que vous êtes mis en examen, vous l'accablez, vous le désignez comme étant le commanditaire, pourquoi ces versions différentes ?" questionne Henri Leclerc. Le vicomte ne se souvient plus, mais il s'énerve : "On était bien trois dans le garage l'après-midi des faits, Jean-Michel a donné le fusil de chasse à Méziane Belkacem, il s'est allongé pour faire le mort et moi je lui ai montré où il fallait qu'il tire pour la tuer. Je n'ai pas pu inventer pareil scénario en arrivant à 16h dans la villa des Bissonnet". Henri Leclerc veut savoir comment Méziane Belkacem a tiré sur la malheureuse. "Au fait, M.Belkacem, aviez-vous des gants ?". Le laveur de carreaux s'embrouille : "Oui, j'ai respecté le plan de M.Bissonnet, mais quand j'ai tiré le premier coup de feu, le gant à ma main  gauche s'est déchiré, quand je me suis blessé". Henri Leclerc : "Expliquez-moi alors pourquoi y avait-il votre empreinte sur une cartouche ?". Belkacem : "Quand la cartouche est tombée du canon, je l'ai ramassée". L'avocat, triomphant : "C'est nouveau, M.Belkacem, vous ne l'aviez jamais dit jusqu'à aujourd'hui.Vous n'avez jamais évoqué avoir ramassé la cartouche, jamais. Et si vous aviez vos gants, comment se fait-il que vous ayez pu laisser cette trace ?". Allusion à l'hypothèse de la présence de deux tireurs sur la scène du crime et de trois coups de feu, que soutiennent Jean-Michel Bissonnet et ses trois avocats. Mais que les experts judiciaires en balistique ont formellement exclu. Ce mercredi, l'interrogatoire de deux-co-détenus du mari est très attendu. Ce sont eux qui sont à l'origine de l'arrêt du premier procès au cinquième jour et à son renvoi, après avoir dénoncé une tentative de subornation de témoins par Jean-Michel Bissonnet : selon eux, le mari voulaient les soudoyer pour faire accuser le vicomte...
Jean-Marc Aubert

2 commentaires:

Damien a dit…

Bonsoir,

Il y a eu de gros accrochages en fin de journée, relatés par le M-L et le Monde, entre JMB qui a explosé et les différents avocats.

Avez-vous pu assister à la fin de l'audience? Votre compte-rendu serait intéressant.

Cordialement

Damien

La Mouette a dit…

Je quitte l'audience à 18h/18h30 (ce soir 19h) pour rédiger le compte-rendu chaque soir, je n'ai donc pas assisté à cette violente réaction de M.Bissonnet. Mais, ce n'est pas la première et la dernière.