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10 févr. 2011

Henri Leclerc en sanglots : "On nous ment depuis trois ans"

COUR D'ASSISES DE L'HERAULT, JEUDI 10 FEVRIER 2011, VINGT-TROISIEME ET DERNIERE AUDIENCE DU PROCES DES TROIS ACCUSES DE L'ASSASSINAT DE BERNADETTE BISSONNET, LE 11 MARS 2008 A CASTELNAU-LE-LEZ.

Jean-Michel Bissonnet a abandonné ses trois avocats à leur sort. Comme ses deux confrères la veille, Henri Leclerc a plaidé l'acquittement du mari ce matin, devant un box où seul avait pris place Méziane Belkacem. Bissonnet est resté dans la salle de garde, dans les coulisses. Comme un acteur déchu...En cinquante-cinq ans de carrière, le ténor des prétoires a gardé le secret : a-t-il déjà défendu un accusé fantôme ? Jean-Michel Bissonnet a fait sa réapparition à l'issue de la plaidoirie de Me Leclerc, en fin de matinée, alors que la cour (le président, ses deux assesseurs, des juges professionnels et les neuf jurés) partait délibérer dans le secret absolu. Calme entre deux gendarmes de l'escorte, il répète qu'il est innocent : "Je suis un écorché vif, mais après tout ce que j'ai entendu, non...Je n'aspire qu'à une chose, retrouver mes enfants, je suis innocent". La parole est donnée à Méziane Belkacem : "J'ai dit tout ce que j'avais à dire, sinon à part d'exprimer de nouveau mes regrets à ceux que je fais souffrir, je n'ai rien d'autre à dire". Puis, au vicomte Amaury d'Harcourt : "Je vous fait toutes mes excuses pour ce que j'ai fait, mes regrets s'adressent à la mémoire de Bernadette et à ses deux enfants, j'avais une amitié profonde pour leur père qui m'a amené là". Le président Joël Mocaer invite l'octogénaire a suivre des policiers jusqu'au verdict. Il est 11h36, quand la cour part délibérer. L'accusation a requis la réclusion criminelle à perpétuité contre le mari, vingt-cinq ans contre Belkacem, dix années contre Amaury d'Harcourt avec mandat de dépôt.
"L'accusation est bâtie sur du sable"
Henri Leclerc a donc porté en dernier la parole pour Jean-Michel Bissonnet. Emu jusqu'aux larmes, "sans doute parce que la vieillesse me gagne" murmure-t-il, Henri Leclerc sanglote quand il avoue "vouloir défendre cet homme contre tous ceux qui voudraient en faire un reclus de l'humanité, un monstre, un pervers et je veux surtout le défendre contre lui. Car, mesdames et messieurs les jurés, Jean-Michel Bissonnet est antipathique, soupe au lait, il hurle, il crie, il geigne, mais ce n'est pas pour ça qu'il est coupable. J'ai toujours entendu dire que ce sont les innocents qui se défendent le plus mal dans les cours d'assises". Il dit sa fierté de "défendre un homme dont je suis convaincu de son innocence devant cette foule venu voir un ténor comme on vient en voir à l'opéra. Je hais ça". Henri Leclerc félicite le travail de Georges Guttierez qui, au ministère public a géré la procédure : "Vous avez posé des questions pertinentes au cours de l'instruction". Mais, il sort ses griffes pour laminer l'avocat général Pierre Denier. Il pointe un doigt vers lui : "Vous, je ne vous permettrai pas de m'interdire de dire ce que je pense, ici, je suis libre de dire ce que je veux". Pour Henri Leclerc, "la vérité du jardinier est celle de l'accusation, mais la colonne s'effondre, car l'accusation est bâtie sur du sable. Cette vérité du jardinier, qui deviendra ensuite la vérité du vicomte, on les doit aux gendarmes qui, dès le début, dès le 11 mars au soir ont la certitude que le mari est coupable. Et cette conviction, les gendarmes vont en faire leur fil rouge durant l'enquête et l'instruction".
"Vingt versions"
Pour l'avocat de Jean-Michel Bissonnet, les vérités du jardinier et du vicomte sont fausses. Procès-verbaux en main, il distille les innombrables incohérences et contradictions dans les déclarations des deux accusateurs, Méziane Belkacem et Amaury d'Harcourt. "Ils ont changé vingt fois de versions, vingt fois, oui, vingt fois. Sur le scénario, ce soi-disant plan diabolique inventé par M.Bissonnet, sur la scène du garage, sur la housse de raquettes de tennis qui contenait le fusil de chasse, sur les horaires, sur leurs itinéraires. Tout sonne faux, ce ne sont que des mensonges. Depuis trois ans, Belkacem et d'Harcourt se défendent en accusant" s'énerve Henri Leclerc. Il hausse le ton, il tempête en agitant ses bras : "J'en ai assez d'entendre plaider que Méziane Belkacem est un pauvre Arabe, non, il est intelligent. Pourquoi ne parle-t-il pas lors de sa garde à vue de l'implication du vicomte ? Un jour il dit qu'il avait des gants pour tirer sur Mme Bissonnet, ici, il nous a dit qu'il n'en avait pas. Et aurait-elle ouverte et reçu dans la maison en l'absence de son mari un visiteur nocturne vêtu d'une parka, la tête dissimulée sous sa capuche et portant des gants blancs en caoutchouc aux mains ? C'est invraisemblable de le croire. Non, moi je vais vous le dire : il s'est passé autre chose dans la ville de la Grenouillère, on nous ment depuis trois ans". Avant de réclamer l'acquittement au bénéfice du doute, le ténor admet "n'avoir pas de mobile à proposer". Au terme de quatre heures de délibéré, la cour et les jurés ont retenu les mobiles avancés par l'accusation, les avocats du frère de Bernadette Bissonnet et des deux co-accusés : trente ans de réclusion criminelle pour le mari, vingt ans pour Méziane Belkacem et huit années pour Amaury d'Harcourt, menotté sur l'audience et emmené vers la maison d'arrêt de Villeneuve-lès-Maguelone. Au bord de l'évanouissement, Jean-Michel Bissonnet embarqué par deux gendarmes lâche : "Justice de merde". Assis dans leur fauteuil, ses deux fils, Marc et Florent sont ko.
Jean-Marc Aubert

1 commentaire:

Damien a dit…

Et voilà, c'est fini. Pour l'instant.


Vous nous avez fait vivre des semaines passionnantes avec vos billets, merci à vous.

Savez-vous que, sur FR3-Languedoc-Roussillon, samedi à 11H, l'émission "La voix libre" sera consacrée au procès Bissonnet avec des journalistes et des avocats des parties?

A Décembre prochain.

Cordialement

Damien